Avec ce recueil de nouvelles j’inaugure le mois « Mai en nouvelles » 2019, initié par Electra (du blog La nuit je mens) et Marie-Claude (du blog Hop ! sous la couette).
Ce recueil regroupe cinq nouvelles marquées par les thèmes de la domination, de la soumission, de la violence et de l’abus de pouvoir, cinq textes complexes et équivoques qui gardent tous une part d’incertitude.
Dans Le Blues du Kuro, une ouvrière militante subit un interrogatoire musclé sans que l’on arrive à déterminer si elle a agi par naïveté ou conviction, si elle a été manipulée ou manipulatrice. Dans Des choses incompréhensibles un homme est accusé de tentative de viol sans que l’on sache s’il est coupable ou victime d’une manipulatrice fabulatrice. L’héroïne de L’Île anonyme (la nouvelle la plus brillante et choquante du livre), jeune enseignante dans un village isolé, est violée par le paria du village avec la complicité passive de tous mais renonce à mettre en garde sa remplaçante. Pour les choses qui disparaissent est un plaidoyer pour le passé et la tradition : un chapelier condamné par le progrès s’obstine à préserver son art. Quant au « héros » de Le Porc de Pyrrhon, il refuse de prendre parti entre des militaires qui terrorisent un train et les voyageurs qui usent de violence pour se défendre.
L’auteur excelle dans l’ambiguïté : résolument, il place ses personnages (et ses lecteurs) face à plusieurs interprétations possibles des événements sans en donner la clé, sans jamais émettre le moindre jugement de valeur. Ses personnages soit ne comprennent pas la situation, soit s’obstinent dans une interprétation partielle. L’auteur évoque ainsi la difficulté de saisir le réel, de distinguer la vérité, et démonte les mécanismes de la conviction ou du consensus : une fois le livre refermé, le doute subsiste.
Si j’ai aimé l’ambivalence qui habite ces textes et le malaise qu’ils suscitent, j’ai regretté un parti pris parfois passéiste ou anti-intellectuel. Donc, mitigée je suis.
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⭐ Yi Munyŏl, L’Île anonyme (Ingmyôngûi sôm), traduit du coréen par Ch’oe Yun et Patrick Maurus, éditions Actes Sud, 2003 (1979, 1983, 1986, 1989), 142 pages, 16 €.
Bof, au vu de ton ressenti, je ne suis pas tentée.
Je te comprends ! ^^
Tu inaugures notre challenge, avec ton billet. Dommage que ta première lecture soit à ce point mitigé. J’espère que tu trouveras plus enthousiasmant pour la suite… Si ça peut t’encourager: j’en suis à mon troisième recueil et le premier a été un flop total!!!
En passant, je m’appelle Marie-Claude, non Claire!
Oups ! Mes excuses ! C’est corrigé !
Je ne m’inquiète pas : j’ai « du bon » qui m’attend dans ma PAL ! 😉
Claire ? je rigole ! Bon sinon oui, dommage mais tu l’as quand même lu en entier ! Oui, parfois certains points de vue ou prises de position nous gênent ..bon allez, il y en a tant d’autres !
C’est pas mauvais hein, c’est même bien écrit, bien construit, mais… Voilà quoi.
C’est tout de même une jolie première participation, qui nous emmène dans des contrées inhabituelles..
J’ai voyagé avec ce recueil ! ^^
Je serais curieuse de lire ce recueil de nouvelles ! Les situations que tu présentes dans ta chronique me font penser un peu à celles que l’on peut trouver dans La loterie et aux contes noires de Shirley Jackson.
Je ne connais pas Shirley Jackson, je vais regarder ça.